C’est une débauche de créativité, un foisonnement de couleurs, de tissus, de froncés, de plissés, de velours, de brocards, de tissages, de sequins, de dentelles, de verroterie de Venise, de plumes, de soies – et je n’ai rien dit – qui attendent le visiteur, éberlué devant tant de splendeur.
Après un lancement très réussi au Palazzo Reale de Milan, où elle a été saluée par un sold out complet, l’exposition débarque au Grand Palais, deuxième étape de sa tournée mondiale réunissant pour la première fois plus de 200 des créations uniques de la maison de mode de luxe. Du Cœur à la Main : Dolce & Gabbana est une déclaration d’amour à la culture italienne, source d’inspiration constante de Domenico Dolce et Stefano Gabbana. Retraçant l’itinéraire esthétique de leurs créations, d’abord portées dans leur cœur, puis exécutées à la main dans leurs ateliers, l’exposition présente également les travaux inédits d’artistes contemporains qui dialoguent avec l’univers de Dolce&Gabbana et la culture. De nombreuses références à des oeuvres d’art italiennes et flamandes se retrouvent souvent comme des morceaux de tapisserie sur les étoffes. L’exposition est conçue en « tableaux ». Les vêtements sont les acteurs d’une mise en scène, dans chaque salle renouvelée avec une symbolique précise. Une des plus extraordinaires est sans doute l’hommage que les deux couturiers font à la Sicile.
Les influences de la céramique et de la calèche sicilienne toujours richement ornées de motifs lors de fêtes traditionnelles, sont ici exubérantes. Des personnages légendaires apparaissent sur les crinolines et les hautes coiffes de plumes s’inspirent des plumets ornant les attelages. Tout y est chatoyant et joyeux.
La salle du Guépard (film culte de Luchino Visconti) déploie toute l’élégance de cette période où Garibaldi devient le véritable artisan de l’unification du Royaume d’Italie. La galerie des miroirs du Palais Gangi à Palerme, où a été tournée la scène fameuse du bal, est réinterprétée dans un style contemporain. Dans les miroirs sans tain apparaissent des scènes du film. Le monde de l’opéra, quintessence du « drame à l’italienne », n’a naturellement pas été oublié et une salle est dédiée à des costumes de scène.
Les références ne manquent pas allant de La Traviata au Barbier de Séville en passant par Madame Butterfly. Cascades de tissus brodés, décorés, accessoirisés, architecturés, le spectacle est là grandiose alors que Pavarotti nous enchante de son Una furtive lacrima.
Et c’est ainsi que le visiteur déambule de salle en salle, de merveille en enchantement, de mise en scène époustouflante en tableaux extravagants avant d’arriver dans l’antre des antres, celle des couturières, mains de fée sans lesquelles, rien de toute cette créativité ne verrait le jour. Cet immense atelier de couture, où des doigts d’or maillent des filets de perles, façonnent des fleurs de soie, épinglent des ornements sur des corsets, drapent des taffetas sur des bustes, est naturellement une mise en scène des vastes ateliers qui se déploient au cœur de Milan. Un hommage à celles et ceux sans qui la haute couture ne pourrait prendre corps.Cette exposition exceptionnelle est celle de tous les superlatifs : elle convoque, l’art, la musique, le folklore, l’histoire, des savoirs séculaires aussi bien que des techniques de pointe. Elle donne à la mode des lettres de noblesse qui la hissent au plus haut de ce qui s’est fait dans ce domaine jusque-là.

