Le Gstaad Menuhin Festival, un écho musical au monde

Comme pour une cinquième saison entre l’été et l’automne, les musiciens de haute volée du Gstaad Menuhin Festival et leur public migrent vers les pâturages verdoyants de la prestigieuse station de l’Oberland bernois. Pour la troisième année consécutive, son directeur artistique Christoph Müller, élabore un programme en résonance avec le monde actuel et ses nombreux défis et changements. Cette année, c’est la migration qui est au cœur de la réflexion au travers d’œuvres musicales, qui par l’histoire qu’elles racontent ou les circonstances dans lesquelles elles ont été créées, nous rappellent que la migration, l’éloignement, la fuite, ou le bannissement est ancré dans l’histoire des peuples. Comme un mirage dans le désert peut refléter une ville à des milliers de kilomètres par un phénomène physique extraordinaire, la musique transporte elle aussi le cri, la détresse, le désespoir comme le rire, la joie ou l’allégresse, à travers l’espace-temps. Peu de formes artistiques cristallisent, avec autant de force que la musique, cette tension entre la souffrance, le désir et l’espoir.

C’est de cela dont il s’agit cette année au Gstaad Menuhin Festival qui ouvre avec un oratorio de Hændel: Israël en Égypte. L’œuvre met en scène ceux qui souffrent sous le joug de l’esclavage et pour qui l’exode est synonyme de libération mais aussi de pertes et de souffrances. C’est le bouillonnant octogénaire William Christie avec les Arts Florissants qui dirigera l’œuvre en l’église de Saanen.

Qui mieux que Chostakovitch pour incarner une âme libre mais désespérée au cœur de la répression soviétique. Toutes deux habituées du festival, Patricia Kopatchinskaja et sa complice Sol Gabetta, font revivre deux chefs-d’œuvre de musique de chambre de ce compositeur qui pour survivre à la torture morale du régime soviétique a mis en place une spectaculaire stratégie d’«émigration intérieure».

C’est un alpage diapré d’étoiles filantes mais aussi montantes qui accueillera un public toujours plus nombreux. Les premières font escale sur les plus grandes scènes du monde, les secondes suivent leur trajectoire. Ainsi on croisera cet été à Gstaad des artistes que l’on ne présente plus, tel que Cecilia Bartoli et sa voix d’or au timbre velouté qui chantera des «Canzoni d’amore», Elina Garanča dans le Requiem de Verdi, Marina Viotti, notre mezzo-soprano suisse adorée dans des airs de Bizet, Sonya Yoncheva dans une version concert de Norma. Les frères Jussen et la magie du piano à quatre mains seront également les invités du festival, sans oublier Daniil Trifonov oscillant entre les valses nostalgiques de Chopin et l’enfance perdue de Tchaïkovski. Last but not least, la belle et rebelle Khatia Buniatishvili ne manquera pas le rendez-vous de Gstaad avec un récital surprise.

La liste est loin d’être exhaustive et comme on a pu s’en apercevoir déjà les années précédentes le festival fera également la part belle aux musiques populaires et folkloriques, celles qui rassemblent, celles qui rappellent le pays et qui donnent les larmes aux yeux parce qu’on sent profondément lui appartenir. Le récital de Regula Mühlemann, entre autres, incarnera cette nostalgie avec «Les chants du pays».

Sur l’Eggli, tradition oblige, alors que Fazil Say soufflera une brise orientale, les Choral Scholars, fine fleur de la grande tradition chorale britannique, nous emmèneront de par le monde, alors que le Yodel rencontrera Gershwin à l’alpage lors d’un flying brunch !

On ne saurait parler du festival sans évoquer la Menuhin Academy qui chaque année s’engage auprès de jeunes talents. La transmission, celle que le grand Menuhin souhaitait, se manifeste par l’encouragement et l’aide financière prodiguée à de jeunes musiciens que le public aura la chance de découvrir lors de concerts mais aussi dans le cadre de master classes. Une chance unique pour découvrir combien la musique est une discipline des plus exigeantes qui laisse peu de place au compromis et encore moins à l’approximation.

Cette dernière édition sur le Changement marquera aussi le départ de Christoph Müller. Celui qui, pendant 25 ans, a perpétué l’excellence mais aussi mené une profonde réflexion sur la musique comme restitution des sentiments humains liés au changement sous toutes ses formes.

gstaadmenuhinfestival.ch

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