En 2003, Nathalie Vranken lançait la première Expérience Pommery, une exposition d’art contemporain au cœur des caves du domaine à Reims. En marge de cet événement annuel qui a déjà mis en valeur le travail de plus de 300 artistes, la directrice générale revient sur la relation étroite qu’entretient la maison champenoise avec le monde de l’art.
Comment appréhendez-vous votre mission à la tête de la maison Pommery ?
«Tout au long de ma carrière, j’ai été motivée par une seule et même chose: entreprendre. Tel un jardin que l’on améliore saison après saison, j’aime construire et améliorer, jour après jour.
Ma mission première consiste à promouvoir l’excellence de nos savoir-faire. Comme une cheffe de famille, je suis le lien entre ses membres. Je les réunis autour d’une vision, afin de les faire avancer dans la même direction, tout en m’assurant que chacun puisse s’épanouir. Représentant la maison Pommery dans le monde entier, je suis à l’écoute des particularités des différents marchés avec lesquels nous travaillons.
L’élaboration du champagne conditionne ma réflexion à chaque étape jusqu’à sa distribution. Mon quotidien est ainsi rythmé par un horizon temps particulier, dans lequel je dois concilier impératifs commerciaux et vision à long terme afin d’anticiper les attentes du monde de demain. Pour vous donner un exemple, nous sommes actuellement en train de mettre en cave les cuvées Louise que nous boirons en 2042!»
Quel est le lien, selon vous, entre champagne, luxe et art ?
«Dans le luxe, il y a cette notion de frivolité, et la fonction de l’objet est souvent dépassée par des considérations purement esthétiques. Selon moi, le champagne n’est pas, de ce point de vue, un objet de luxe. Nous vendons avant tout du rêve et du bonheur. Le champagne n’est pas non plus un verre de vin rouge concentré en polyphénols. C’est un good treat to yourself. Il est joyeux, il pétille. Certains se rappellent de ce qu’ils ont bu lors de moments heureux, d’autres choisissent une bouteille en fonction de leur éducation. Mon travail consiste à reconnecter les gens à ces souvenirs. A travers l’art de l’assemblage, je veille à ce que ce lien avec la marque ne soit jamais rompu. En fonction de ce que la nature nous offre, ce travail aidé par les vins de réserve nous permet d’obtenir un style reconnaissable partout dans le monde.»
Quel est votre regard personnel sur l’art ?
«Le fait d’échanger avec des artistes, des curateurs, des directeurs de musée ouvre mes perspectives sur ce que sera le monde de demain. J’ai toujours été émerveillée par la capacité des artistes à anticiper les changements sociétaux.
De nos jours, la multiplication des foires et des événements artistiques a permis un formidable emballement de la création. Au cœur des caves, les artistes qui participent aux Expériences Pommery doivent créer en fonction d’un taux d’humidité de 98% et une température de degrés. A 30 mètres sous terre, sur ce terrain de jeu unique au monde, le temps semble avoir suspendu sa course. Les limitations deviennent un moteur de créativité et poussent les artistes à une réflexion collective.
A titre personnel, j’aime dire que je collectionne des souvenirs. La plupart des œuvres de notre collection est issue des Expériences. Ce sont celles qui ont tenu à l’épreuve des crayères.
Un autre exemple qui illustre la capacité de l’art à révéler la subtilité est l’habit de la cuvée Louise. Orné de bleu pour la pureté du Cramant, de rose pour l’élégance d’Aÿ, et d’or pour la noblesse d’Avize, le flacon se pare de lignes colorées qui évoquent sa composition tout à fait unique.»
Quels sont les derniers projets artistiques menés par Pommery ?
«Pommery soutient notamment des institutions comme le Centre Pompidou ou le Musée d’Orsay. Ce dernier partenariat est d’autant plus significatif que la première exposition des impressionnistes en coïncide avec la création du premier brut par Madame Pommery. Nous sommes également fiers de nos partenariats internationaux, notamment avec le Musée d’Art contemporain d’Australie à Sydney et la foire The Armory Show à New York.
Précurseur dans l’univers du champagne, Pommery l’est aussi dans l’art contemporain, à travers les Expériences lancées en 2003. Le but est d’offrir une expérience artistique hors du temps, dans nos caves et nos jardins. Fin novembre, nous lancerons l’Expérience Pommery n°18, dont le thème sera « Mélodie en sous-sol ». Cette année, les artistes ont appréhendé les caves tel un retour rassurant à la matrice, un lieu où l’on est protégé et où règne une certaine forme d’harmonie, en contraste avec le chaos terrestre. L’exposition présentera notamment l’œuvre de l’artiste suisse Julian Charrière.»